Le livre de la rentrée « ANTHRO-VISION », de Gillian Tett

Par Axelle Vindel
— Sep 2, 2021


Le livre de la rentrée « ANTHRO-VISION », de Gillian Tett

Du Wall Street Journal jusqu’à la Harvard Review, le nouveau livre Anthro-Vision de Gillian Tett (docteur en anthropologie et éditorialiste du Financial Times), fait parler de lui et se place en tête des lectures Business. 

 

Ce livre met à l’honneur l’IA, non pas l’Intelligence Artificielle mais l’Intelligence Anthropologique, comme réponse aux biais et aux limites de la Data. La data est importante certes, mais s’y fier aveuglément pour gouverner notre économie, nos business, serait une erreur. 

 

Plébiscité par le psychologue et économiste Daniel Kahneman, père des biais cognitifs, ce livre nous présente les limites de la Data dans un monde incertain, globalisé, à travers des études de cas concrets, ainsi que les opportunités de cette science du comportement pour faire émerger une vraie connaissance des besoins et attentes des consommateurs / citoyens du monde. 

 

 

Dans son analyse, Gillian Tett préconise de cesser de pratiquer l’IA, Intelligence Artificielle, pour l’IA, l’Intelligence Anthropologique. En résumé, cesser de faire du quantitatif pour du qualitatif, en adoptant une approche anthropologique, via le terrain ou l’observation participative. Alors que la data capture une information à un instant T, les techniques d’immersion permettent de rendre familier ce qui nous est étranger, en mettant en lumière le sens des comportements des communautés. 

 

L’objectif est de comprendre réellement les communautés de l’intérieur avec une réelle empathie, comme réponse à la diversité du monde, afin de casser les fausses présomptions. 

 

Par cette approche, on est en mesure de rendre l’étranger familier et le familier étrange, en révélant par une vision périphérique, les questionnements latéraux ou encore les évidences aveuglantes de nos environnements. 

Pour illustrer le propos, l’ouvrage Anthro-Vision développe entre autres le cas de Jigsaw, l’incubateur Tech de Google, dont la mission était de réduire la présence des contenus complotistes dans le moteur de recherche. Cela passait par l’amélioration de l’algorithme, ou des process de signalement des contenus litigieux.

 

A l’origine, leur démarche était essentiellement orientée data. Néanmoins pour améliorer l’outil de détection, il leur est vite apparu essentiel de comprendre la dimension humaine du complotisme : quels étaient les individus de ces écosystèmes, leurs systèmes de valeurs, leurs modes de partage de l’information.

 

L’état major de Google a décidé de faire appel à des anthropologues pour mener une quarantaine d’entretiens avec des complotistes. Objectifs : les écouter et les observer pour mieux comprendre leurs comportements et leurs attentes.

 

Résultat de cette immersion, les sites jugés crédibles par les adeptes du complot sont loin des standards UX du moment, mais très Low Tech et souvent avec une orthographe hasardeuse. Leur aspect « blog » est source d’authenticité et donc de « véracité » pour les adeptes de cette communauté.

 

Grâce à la bonne compréhension du mode d’action des complotistes, permise par l’approche anthropologique, Jigsaw a pu améliorer son système et limiter de façon plus massive ce type de contenus.  

 

Le livre met en lumière bien d’autres exemples résonnants comme ceux de grands groupes ayant eu recours à l’anthropologie : Nestlé, Mars, P&G, General Motors, la City de Londres…

 

Le propos de Gillian Tett n’est pas de minimiser l’importance de la Data, mais bien de montrer que la Data seule n’est pas une vérité absolue. Alors que celle-ci capture une information à un instant T, l’anthropologie prend le relais et permet de relever nos angles morts ou évidences aveuglantes. Cette science invite à ne rien supposer et permet de remettre en question nos présomptions et postulats. Elle constitue une superbe boîte à outils pour gouverner, administrer, innover dans un monde volatile, complexe, incertain.

Dans un monde toujours plus divers, partir de ses seules convictions et compréhensions apparaît de plus en plus risqué.

 

L’ouvrage est un vrai plaidoyer à réinventer nos outils pour accompagner le changement, sortir d’une vision silotée, comme les organisations peuvent nous y enfermer en reprenant le chemin du questionnement des environnements, des consommateurs, des tribus…

 

ANTHRO-VISION, de Gillian Tett

Disponible aux éditions Veltman Distributie Import Books.


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